Réécrire la COP15

Du 7 au 19 décembre 2022, la ville de Montréal accueillait la 15e conférence des Nations unies sur la biodiversité –COP15. L’objectif de la conférence consistait à adopter un cadre mondial de la biodiversité dans le but de conserver, protéger, restaurer et gérer durablement la biodiversité et les écosystèmes planétaires. Pour la durée de l’événement, des milliers de personnes affluaient quotidiennement vers le Palais des congrès de Montréal qui était devenu un territoire international. Les parties prenantes étaient variées: des représentantes et représentants gouvernementaux, des organisations de la société civile –dont des groupes autochtones, des groupes de femmes, des groupes de jeunes–, le milieu des affaires, le milieu de la recherche. Tout était là pour souligner le fait que des enjeux de biodiversité et d’environnement ne se limitent pas aux frontières d’un état, d’une discipline, d’un champ d’intérêt. Les engagements de l’humain à l’endroit de son environnement mobilisent une foule de valeurs, de significations et d’usages.

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Légende / Description

Chrysalidocarpus. 1001 Place Jean-Paul Riopelle. Photographie et montage par Elise Warren.

Parmi tous ces gens, un petit groupe de littéraires de l’UQAM prenait part à sa manière aux discussions sur la biodiversité. Que ce soit par des pratiques d’écritures, comme la nature writing, ou par des discours critiques, théoriques et historiques, comme l’écocritique ou l’écopoétique, des enjeux environnementaux ne sont pas étrangers à la littérature. Et donc la présence de littéraires à une conférence internationale sur la biodiversité, même si celle-ci n’était pas en ou sur la littérature, se justifiait. Mais de manière encore plus précise, la présence de notre groupe reposait sur un constat somme toute simple: l’essentiel de la conférence se déroulait dans le langage et avec le texte, des dénominateurs communs de la littérature. Dans les groupes de travail chargés de rédiger les sections du document final, des centaines de personnes, qui ne s’identifieraient sans doute pas comme littéraires, étaient pourtant attablées devant des documents à discuter de définitions, de formulations de phrases, d’interprétations. À un moment où piétinaient les discussions sur un point particulier, un président de séance a dit: «nous ne gagnerons pas de prix littéraire avec ce travail». Toutefois, gagner des prix, ce n’est qu’une manière de s’engager dans la littérature. Il semble assez clair que tout le travail en amont, l’écriture, la lecture, la correction, l’édition disposaient les participantes et les participants à une exploration littéraire –préliminaire, mais réelle. 
 
Partant de ce constat, les membres de notre petite équipe de littéraires de l’UQAM ont récupéré des textes qui circulaient lors de la COP15: textes de travail, dépliants, allocutions, articles médiatiques, bribes de discussions, mots à la mode (buzzwords), et autres objets qui structuraient les expériences vécues lors de la conférence. Ces textes en main, nous avons voulu développer leur potentiel littéraire. Cette opération pouvait assurément se réaliser de plusieurs manières. Suivant les termes consacrés par Gérard Genette, les hypotextes pouvaient donner lieu à une grande variété d’hypertextes selon les interprétations de toutes et de tous. Ce cahier thématique recueille les différentes tentatives de mettre à jour des pertinences littéraires latentes dans des objets qui n’étaient pas a priori conçus pour répondre aux exigences d’une communauté littéraire.
 
Au final, ce projet nous a permis d’expérimenter avec des savoir-faire littéraires, tant formels que thématiques. Et plus en lien avec le thème spécifique de la COP15, en pluralisant les textes sur la biodiversité nous nous sommes appliqués à exposer la vitalité de la littérature, à multiplier nos attachements, comme dirait Rita Felski, avec le monde et avec les textes.

 
Remerciements
Nous remercions d’abord et avant tout Mme Chantal Robichaud du Secrétariat de la convention sur la diversité biologique, qui a été très réceptive à notre projet et qui a facilité sa réalisation. Nous remercions l’UQAM de nous avoir inclus dans sa délégation accréditée de la COP15. Soulignons enfin que ce projet a été rendu possible par l’appui financier de la Faculté des Arts de l’UQAM et du CRSH.

Pour citer

2023. Réécrire la COP15. Cahier virtuel. Numéro 8. En ligne sur le site Quartier F. http://quartierf.org/fr/cahier/reecrire-la-cop15

 

Jonathan Hope
Lors de votre allocution à la cérémonie d’ouverture de la COP15 vous avez mentionné: « on continue d’augmenter la liste des espèces menacées ou vulnérables ».
Esther Laforce
Je ne sais trop à qui je m’adresse, mais j’ai envie d’écrire: parlez-moi de votre inquiétude. C’est elle qui m’intéresse.
Maxime Fecteau
Le 16 décembre au matin, avant de me rendre au Palais des congrès de Montréal, où se tenaient alors les négociations de la COP 15 des Nations unies sur la biodiversité, je me suis rendu dans un café près de chez moi pour faire quelques heures de lecture.
Élise Warren
Écocide. Un terme qui ne devrait pas exister. Un mot à regarder droit dans les yeux.
Alexandre Côté-Perras
Le tirage en forme de fer à cheval est une lecture du tarot qui requiert sept cartes. Chacune des cartes est pigée par le demandeur, puis disposée en « V » sur la table. Cette trajectoire esquisse le portrait d’une situation vécue.
Erika Leblanc-Belval
Il y a quelque chose de gros, d’immense dans ces rencontres qui me font sentir un peu en marge: j’ai toujours l’impression que je ne mérite pas ma place parmi tous ces hommes en complets-cravates.
David Paquette-Bélanger
Petite esquisse d’un paysage archi-connu pouvant servir à [consoler] [-conforter] les têtes de verre
Cassie Bérard
nous y sommes à l’instant mais rien ne se passe comme prévu