Oui
http://quartierf.org/fr/taxonomy/term/3
frAlexandra Boilard-Lefebvre
http://quartierf.org/fr/complice/alexandra-boilard-lefebvre
<span>Alexandra Boilard-Lefebvre</span>
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<div class="field--label sr-only">Type d'entité</div>
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<div class="field--item">Étudiante</div>
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<span><span lang="" about="http://quartierf.org/fr/user/23" typeof="schema:Person" property="schema:name" datatype="" xml:lang="">Cassie Bérard</span></span>
<span>lun 30/03/2020 - 21:08</span>
<div class="field field--name-body field--type-text-with-summary field--label-hidden field--item"><p>Alexandra Boilard-Lefebvre est à la maîtrise en études littéraires, au profil création, à l'Université du Québec à Montréal, sous la direction de Cassie Bérard. Elle a collaboré à la revue <em>Filles Missiles</em> et son texte, "Nos noyades", a été demi-finaliste au Prix de la création de Radio-Canada 2018.</p>
</div>
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<div class="views-element-container form-group"><div class="view view-eva view-contenus-vs-entite view-id-contenus_vs_entite view-display-id-entity_view_2 js-view-dom-id-b994d8b19d8f74187ce3d4175445eea9b341d30215915d72c17b8d8383a11b5d">
Participation
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<div class="views-col col-1" style="width: 33.333333333333%;"><div class="views-field views-field-title"><span class="field-content"><a href="http://quartierf.org/fr/actualite/projet-f-fiction-collective" hreflang="fr">Projet F - Fiction collective</a></span></div></div>
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Tue, 31 Mar 2020 01:08:21 +0000Cassie Bérard254 at http://quartierf.orgProjet F - Fiction collective
http://quartierf.org/fr/actualite/projet-f-fiction-collective
<span>Projet F - Fiction collective</span>
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<div class="field--label sr-only">Type d'actualité</div>
<div class="field--item">Parution</div>
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<span><span lang="" about="http://quartierf.org/fr/user/23" typeof="schema:Person" property="schema:name" datatype="" xml:lang="">Cassie Bérard</span></span>
<span>lun 30/03/2020 - 20:58</span>
<div class="field field--name-field-date-debut-actualite field--type-datetime field--label-inline">
<div class="field--label">Date de début</div>
<div class="field--item"><time datetime="2020-03-30T04:00:00Z">30/03/2020 - 00:00</time>
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<div class="field--label">Date de fin</div>
<div class="field--item"><time datetime="2020-10-30T04:00:00Z">30/10/2020 - 00:00</time>
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<div class="field field--name-body field--type-text-with-summary field--label-hidden field--item"><p><a href="https://projetf.org/">PROJET F</a>, c'est une expérience littéraire de recherche-création. C'est une disparition. C'est une expédition. Une enquête. Inventée par dix auteurs, autrices. Narrateurs, narratrices. En quête d'autorité. C'est une fiction débordante. C'est une multitude de trajectoires de lecture. C'est une tonne de pièces d'archives. Des fichiers cachés. Des masques. Et des fous rires. Une arborescence de textes, que vous lirez, nous l'espérons, avec un grand plaisir. C'est ici, sur <a href="https://projetf.org/">projetf.org</a>.</p>
</div>
<div class="field field--name-field-organisation field--type-entity-reference field--label-inline">
<div class="field--label">Organisation</div>
<div class="field__items">
<div class="field--item"><a href="http://quartierf.org/fr/complice/cassie-berard" hreflang="fr">Cassie Bérard</a></div>
<div class="field--item"><a href="http://quartierf.org/fr/complice/pierre-marc-grenier" hreflang="fr">Pierre-Marc Grenier</a></div>
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</div>
<div class="field field--name-field-participation field--type-entity-reference field--label-inline">
<div class="field--label">Participation</div>
<div class="field__items">
<div class="field--item"><a href="http://quartierf.org/fr/complice/alexandra-boilard-lefebvre" hreflang="fr">Alexandra Boilard-Lefebvre</a></div>
<div class="field--item"><a href="http://quartierf.org/fr/complice/nelly-desmarais" hreflang="fr">Nelly Desmarais</a></div>
<div class="field--item"><a href="http://quartierf.org/fr/complice/antoine-dussault" hreflang="fr">Antoine Dussault</a></div>
<div class="field--item"><a href="http://quartierf.org/fr/complice/marie-pier-lafontaine" hreflang="fr">Marie-Pier Lafontaine</a></div>
<div class="field--item"><a href="http://quartierf.org/fr/complice/esther-laforce" hreflang="fr">Esther Laforce</a></div>
<div class="field--item"><a href="http://quartierf.org/fr/complice/jean-philippe-lamarche" hreflang="fr">Jean-Philippe Lamarche</a></div>
<div class="field--item"><a href="http://quartierf.org/fr/complice/olivier-talbot" hreflang="fr">Olivier Talbot</a></div>
<div class="field--item"><a href="http://quartierf.org/fr/complice/jean-francois-vaillancourt" hreflang="fr">Jean-François Vaillancourt</a></div>
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<div class="field--label sr-only">Lieu</div>
<div class="field--item"> <iframe width="100%" height="350" frameborder="0" style="border:0" src="https://maps.google.com/maps?hl=fr&q=Isle-aux-Grues&t=m&z=14&output=embed"></iframe>
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Tue, 31 Mar 2020 00:58:01 +0000Cassie Bérard253 at http://quartierf.orgLe tournevis
http://quartierf.org/fr/publication/le-tournevis
<span>Le tournevis</span>
<div class="field field--name-body field--type-text-with-summary field--label-hidden field--item"><blockquote>
<p>[L’interprétation] est toujours avec nous, mais, comme la plupart des activités intellectuelles, elle n’est intéressante qu’à partir du moment où elle est extrême.<br />
Jonathan Culler, <em>Interprétation et surinterprétation</em></p>
</blockquote>
<p>Sarah allait s’asseoir sur la chaise en bois à la table de la cuisine. Une chaise parmi les quatre dont Vincent et elle s’étaient équipés dans un magasin de meubles à bas prix. Évidemment, ce réflexe économe comportait des inconvénients: depuis l’achat, il avait fallu serrer les vis chaque mois (au moins tous les mois resserrer) et admettre que le tissu des sièges allait bientôt se déchirer aux points de tension. Sarah portait une robe noire. L’ourlet frôlait ses genoux. Le décolleté muni de paillettes scintillait en captant la jeune lumière entre les stores. Ses parents avaient passé la nuit chez elle; ils venaient de quitter à l’aurore pour se reposer un peu et se préparer. Comme Sarah, ils porteraient des vêtements neufs, sans extravagance. Sa robe était d’une élégance discrète. Elle eut pu convenir pour un lancement de livre, une conférence, un gala. À un autre moment (dans une autre vie). Sarah attendait son fils, qui viendrait la chercher. Il serait accompagné de sa nouvelle fréquentation et d’un ami d’enfance qui avait bien connu Vincent. Entretemps, elle se retrouvait seule avec la boîte posée sur la table, l’emballage gondolé par endroits, là où, devinait-elle, la moiteur des mains de Vincent avait dû se loger, déformant le papier. Sarah allait regarder longuement cette boîte et se laisser secouer par des émotions contradictoires: curiosité et panique. Au moindre spasme de son corps, la chaise instable menacerait de s’écrouler sous elle. Sarah finirait par se lever, se rendre dans le sous-sol, ouvrir l’armoire. Elle s’emparerait du tournevis étoile et remonterait. Elle ferait basculer les quatre chaises sur le sol puis s’agenouillerait pour serrer une à une les vis. Dans l’action, elle penserait: cette scène improbable appartient à un livre de théorie littéraire, et par distraction, elle percerait un trou profond dans le tissu avec l’outil. Le manche du tournevis était noir. Parfaitement assorti avec sa tenue.</p>
<p>Il n’y a pas de nature du texte littéraire, affirma Rorty, ce à quoi se permit de répliquer Eco, qui croyait que le texte contenait en potentiel (là se précisait sa nature) un certain nombre d’interprétations. C’était croire, se moqua Rorty, à une objectivité du texte que de parler de sa nature (conception totalement aberrante à ses yeux). Un texte ne devait pas imposer des interprétations, pas plus qu’un objet, des utilisations, voulut-il démontrer. Le tournevis eut alors un rôle à jouer dans le débat. </p>
<p>Quand ils s’étaient installés ensemble dans la maison vingt ans plus tôt, Sarah et Vincent avaient eu un accroc qui avait manqué ruiner leur relation. Sarah n’avait jamais été dotée de talent pour les travaux manuels, mais s’était entêtée à poser les tablettes qui allaient soutenir, dans une pièce oubliée du sous-sol, leurs boîtes respectives de paperasses et de souvenirs. Ces boîtes, vous savez, qui camouflent la jeunesse (les crimes), que chacun traîne avec soi jusqu’au vieil âge mais se refuse en fin de compte à rouvrir. Vincent avait rangé une boîte bien scellée, destinée à le rester. Or le paquet aussitôt déposé avait subi une chute (les tablettes mal vissées) et il s’était fendu. Sarah avait eu droit à une série de propos désobligeants. Puis Vincent s’était empressé de remballer la boîte. Sarah n’avait pas eu accès à son contenu. Toutefois, la seule possibilité (la présence du secret) avait creusé une faille dans leurs rapports. Elle s’était raconté, à partir de cette faille, une histoire impardonnable.</p>
<p>Pour Rorty, c’était l’usage d’un texte qui revêtait une importance et non le sens qu’on lui attribuait en tentant d’en élucider les structures. Du point de vue d’Eco, qui ne niait pas qu’on puisse trouver certaines utilités à un texte, là n’était pourtant pas sa destinée: le texte demandait à être interprété. Si plusieurs de ses propriétés ne se prêtaient pas à l’utilisation (argument qui fragilisait la démarche de Rorty), aucune ne se soustrayait à la signification.</p>
<p>Sarah avait lu <em>Interprétation et surinterprétation</em> à l’occasion d’un cours de sémiotique à l’université et avait été bouleversée par l’affrontement entre l’homme pragmatique et l’herméneute. Elle avait alors encouragé Vincent à lire l’ouvrage pour qu’ils puissent en discuter ensemble. Contre toute attente, la lecture avait entraîné plus de discorde que de discussions, confirmant le malaise qu’ils avaient vu s’installer dans leur couple dès les premières années, à savoir qu’ils se comportaient dans la vie comme dans les lettres suivant des philosophies étrangement antithétiques. Si Sarah se demandait pourquoi des vis étoile plutôt que carré pour fixer des tablettes au mur, Vincent répondait que l’important était qu’on puisse entreposer nos boîtes sans qu’elles échouent sur le plancher.</p>
<p>Ce que maintint Rorty, c’était bien l’idée qu’il n’existait pas d’objectivité du texte ou de la chose. Ainsi, il avait pris pour exemple le tournevis, s’offusquant qu’on lui associe une fonction propre. Celui qui serre des vis, celui qui ouvre un paquet et celui qui se gratte l’oreille, avait-il dit, font pareillement un usage du tournevis; un usage juste, qui n’entre pas en contradiction avec l’objet utilisé.</p>
<p>À peine quelques jours plus tôt, Sarah avait découvert le corps de Vincent dans le sous-sol, suspendu à une poutre du plafond grâce à une rallonge électrique de couleur blanche qui avait servi depuis vingt ans à brancher les trois lampes de leur chambre à coucher. Sur le moment, elle n’avait pas fait le lien avec les lampes. Mais, après tout le branle-bas des ambulanciers, de la famille, elle s’était retirée pour se reposer dans la chambre: trois lampes déconnectées étaient fracassées sur le sol. Sarah s’était étendue sur le lit, heurtant avec son pied la boîte scellée que Vincent avait pris soin de mettre en évidence. </p>
<p>Utiliser un tournevis pour visser une vis, pour ouvrir un paquet ou pour se gratter l’intérieur de l’oreille ne constituait pas une preuve, selon Eco. Car un tournevis pouvait aussi être noir, et cet aspect ne répondait à aucun usage (sauf d’un point de vue esthétique, si on en prévoyait l’utilisation dans une cérémonie funéraire).</p>
<p>Le fils de Sarah allait apparaître dans la maison avec sa compagne et son ami pour surprendre sa mère accroupie entre deux chaises, un tournevis dans la main. Elle le faisait tournoyer dans sa paume, prouvant qu’on puisse classer l’outil parmi les objets courbes. Il était impossible, par exemple, d’en dire autant d’une boîte, et cela expliquait notamment qu’on range une boîte sur une tablette et un tournevis dans l’armoire. Une boîte n’avait rien à faire sur un lit, et encore, sur une table de cuisine, elle allait devenir rapidement encombrante.</p>
<p>Sarah se lèverait, voyant son fils, et elle dépoussiérerait sa robe noire. Elle ouvrirait ensuite la penderie pour prendre son manteau et son sac à main. Avant de sortir, elle reviendrait sur ses pas, attraperait par terre le tournevis et l’enfouirait ni vu ni connu dans le sac dont elle aurait d’abord glissé la ganse sur son épaule. Elle aurait une pensée orientée vers l’humour prévisible des théoriciens de la lecture, puis une pensée vers celui, stérile, des pragmatistes. Elle retoucherait, devant le miroir, son maquillage; elle laisserait intact le paquet sur la table. </p>
</div>
<span><span lang="" typeof="schema:Person" property="schema:name" datatype="" xml:lang="">Anonyme</span></span>
<span>ven 24/01/2020 - 10:32</span>
<div class="field field--name-field-citation field--type-text-long field--label-above">
<div class="field--label">Pour citer</div>
<div class="field--item"><p>Bérard, Cassie. 2020. Le tournevis. Publication en ligne sur le site <em>Quartier F</em>.<br />
<a href="http://quartierf.org/fr/publication/le-tournevis">http://quartierf.org/fr/publication/le-tournevis</a></p>
</div>
</div>
<div class="field field--name-field-ref-biblio field--type-text-long field--label-visually_hidden">
<div class="field--label sr-only">Référence bibliographique</div>
<div class="field__items">
<div class="field--item"><p>Eco, Umberto. 1996. Interprétation et surinterprétation, avec la participation de Richard Rorty et Jonathan Culler. Paris. P.U.F. (1992). </p>
</div>
</div>
</div>
Fri, 24 Jan 2020 15:32:38 +0000Anonyme249 at http://quartierf.orgAnatomies graphiques
http://quartierf.org/fr/entree-de-carnet/anatomies-graphiques
<span>Anatomies graphiques</span>
<div class="field field--name-field-auteur-entree-carnet field--type-entity-reference field--label-above">
<div class="field--label">Auteur·e·s de l'entrée de carnet</div>
<div class="field__items">
<div class="field--item"><a href="http://quartierf.org/fr/complice/pierre-marc-grenier" hreflang="fr">Pierre-Marc Grenier</a></div>
</div>
</div>
<span><span lang="" about="http://quartierf.org/fr/user/23" typeof="schema:Person" property="schema:name" datatype="" xml:lang="">Cassie Bérard</span></span>
<span>mer 20/03/2019 - 17:08</span>
<div class="field field--name-field-date-publication-entree field--type-datetime field--label-above">
<div class="field--label">Date de publication de l'entrée</div>
<div class="field--item"><time datetime="2019-03-20T12:00:00Z">20/03/2019</time>
</div>
</div>
<div class="field field--name-field-carnet-referent field--type-entity-reference field--label-above">
<div class="field--label">Carnet référent</div>
<div class="field--item"><a href="http://quartierf.org/fr/carnet/exceder-la-ligne" hreflang="fr">Excéder la ligne</a></div>
</div>
<div class="field field--name-body field--type-text-with-summary field--label-hidden field--item"><blockquote>
<p>[I]l vaut mieux ne pas se fier aux oeuvres de fiction.</p>
Cassie Bérard et Jean-Philippe Lamarche</blockquote>
<ol>
<li>On jurerait l’avoir enterré pour de bon. Pourtant le voilà au fond du salon, mâchant innocemment une viennoiserie. On hésite. Peut-être qu’on s’est trompé. On fait tourner les pages jusqu’au témoignage textuel de son décès. Le voilà. Un court passage, au beau milieu du paragraphe supérieur de la page 337. On tapote furieusement la feuille, on grommelle devant cette parjure: «Albertine, elle, fut très occupée par les funérailles du baron D., qui venait de succomber à une apoplexie au retour de son voyage en Afrique».</li>
<li>Ainsi on se retrouve devant une singulière aberration, un peu comme si l’on avait croisé le regard d’un comédien sur scène alors que l’on est dans la foule. S’agit-il d’une distraction de la part de l’auteur ou de l’autrice? Peu importe. L’incohérence demeure.</li>
<li>On serait tenté de réprimer cet écueil. Or, nier les aspérités logiques de l’œuvre (et ce, même au profit d’une version présumément «correcte»), c’est, au fond, créer une dérive, se déplacer imperceptiblement d’un texte à un autre. Au lieu d’«épurer» l’œuvre de ses incohérences, comme l’on pasteurise le lait pour produire un liquide homogène, pourquoi ne pas faire de la méfiance –de cette matière hétérogène, foisonnante de vie– un attrait, pour ainsi dire, de l’activité de lecture?</li>
<li>Le retour suspect du baron –artifice volontaire ou bévue– ne fait que témoigner de la nature fondamentalement concaténée de l’activité de narration. Ni l’un ni l’autre de ces chapitres ne se fait le témoignage, en soi, d’une vérité primordiale. Notre baron est un mort-vivant. Ni définitivement passé de l’autre côté, ni totalement rescapé de sa propre mort. Reconnaître la «vérité» des deux versions nous force à prendre une position de recul vis-à-vis de l’œuvre, à créer une sorte de topologie de ses multiples unités narratives.
<article class="embedded-entity align-right"><div class="view-mode-image_embed_demi_largeur">
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<div class="field field--name-field-legende-description field--type-text-long field--label-visually_hidden">
<div class="field--label sr-only">Légende / Description</div>
<div class="field--item"><p>Graphique Excès de fiction 1</p>
</div>
</div>
</div>
</article>
</li>
<li>On étend donc le dispositif textuel sur sa longueur. On prend un crayon. On trace une ligne bien droite. Ce segment représente l’unité narrative suggérant la mort du baron D. On ajoute à cela une autre ligne, plus haute, et plus éloignée sur l’axe horizontal (axe qui représente le temps non pas de la fiction mais le temps du récit). Il y a maintenant, sur notre feuille, deux segments parallèles.</li>
<li>Erreur fréquente: la «hauteur» du graphique (l’axe transversal à nos segments) ne représente pas l’«enflement» d’une valeur, mais le plan sur lequel on peut se figurer l’écart entre les unités narratives. Les opérations (voltiges) des lignes narratives ne se limitent pas à une telle disjonction, elles sont multiformes. Les combinaisons sont virtuellement infinies.</li>
<li>Ainsi le fil narratif est à la fois cohérent et incohérent. Cohérent dans son ensemble, d’abord, quand il se constitue (ou veut bien se constituer) en une structure plus ou moins logique. Il est, en quelque sorte, un ensemble organisé. On dit de lui, d’autre part, qu’il est incohérent, lorsque certains de ses chaînons narratifs viennent «briser» l’ensemble, lorsque chacune des cellules problématiques introduit en son sein une inquiétude, une «difformité logique» de plus.</li>
<li>«À l’éclat de la vérité, à sa quête et à son désir qui se seraient émoussés, à l’authentique et stable unité des discours, succéderaient, en fait, une constante équivoque, une fuite du sens vrai et la découverte de sens trompeurs, empilés.» (Bérard et Lamarche, 2018)</li>
<li>S’approprier le texte (aller à sa rencontre) comme on (re)produit une partition à partir d’une chanson. Examinons nos outils.
<article class="embedded-entity"><div class="view-mode-image_embed_pleine_largeur">
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<div class="field--label sr-only">Image</div>
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<div class="field field--name-field-legende-description field--type-text-long field--label-visually_hidden">
<div class="field--label sr-only">Légende / Description</div>
<div class="field--item"><p>Graphique Excès de fiction 2</p>
</div>
</div>
</div>
</article>
</li>
<li>Notre geste sera, peut-être, d’interpréter graphiquement l’entrelacement des multiples horizons logiques suggérés par un texte trompeur aux anomalies stratégiques: rendre visible le labyrinthe textuel avec la rigueur de l’arpenteur géomètre. </li>
</ol>
</div>
<div class="field field--name-field-ref-biblio field--type-text-long field--label-visually_hidden">
<div class="field--label sr-only">Référence bibliographique</div>
<div class="field__items">
<div class="field--item"><p>Bérard, Cassie. Lamarche, Jean-Philippe. 2018. «Littérature suspecte. Présentation du dossier», <em>Captures</em>, vol. 3, no 2 (novembre). [En ligne]. <a href="revuecaptures.org/node/3075">revuecaptures.org/node/3075</a></p>
</div>
</div>
</div>
Wed, 20 Mar 2019 21:08:21 +0000Cassie Bérard202 at http://quartierf.orgExcéder la ligne
http://quartierf.org/fr/carnet/exceder-la-ligne
<span>Excéder la ligne</span>
<div class="field field--name-body field--type-text-with-summary field--label-hidden field--item"><p>Les récits fracturés, distordus, chaotiques abondent en littérature, nous forçant à nous pencher sur les narrations fictionnelles pour leurs dysfonctionnements. Ces derniers pointent une scission complexe entre vérité et fiction qui entraîne au sein des œuvres un excès de fiction. Les débordements de la fiction au cœur de la fiction littéraire ne sont pas sans entretenir des relations avec nos perceptions courantes (illusions, méprises, anticipations, surinterprétations), influencées par des phénomènes discursifs qui incitent à la méfiance et activent les fabulations individuelles ou collectives. </p>
<p>En plus d'interroger la fiction comme mécanisme compensatoire à l’affaiblissement des valeurs de vérité, notre carnet tâche d’éclairer les dispositifs créatifs que sont la distorsion, la disjonction et la déviation narratives. </p>
<p>Sur le plan de la création littéraire, nous nous posons les questions suivantes : a) quels conflits de perception mettent en branle les pratiques narratives de fiction? et b) pourquoi faire de la fiction dans un monde à ce point stratifié par la fiction?</p>
<article class="embedded-entity align-center"><div class="view-mode-image_embed_pleine_largeur">
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<div class="field--label sr-only">Image</div>
<div class="field--item"><a href="http://quartierf.org/sites/qf.aegir8.uqam.ca/files/2019-03/18174419026_db332e4794_o_0.jpg" title="<p>Image from page 215 of "Annales de la Societe Linnéenne de Lyon" (1836) <br />
Title: Annales de la Societe Linnéenne de Lyon</p>
" data-colorbox-gallery="gallery-all-9KQCPSbM-lY" class="colorbox" data-cbox-img-attrs="{"alt":""}"><img src="http://quartierf.org/sites/qf.aegir8.uqam.ca/files/styles/embed_media_image_large/public/2019-03/18174419026_db332e4794_o_0.jpg?itok=Hpv6e7Q4" width="312" height="276" alt="" typeof="foaf:Image" class="img-responsive" />
</a>
</div>
</div>
<div class="field field--name-field-legende-description field--type-text-long field--label-visually_hidden">
<div class="field--label sr-only">Légende / Description</div>
<div class="field--item"><p>Image from page 215 of "Annales de la Societe Linnéenne de Lyon" (1836) <br />
Title: Annales de la Societe Linnéenne de Lyon</p>
</div>
</div>
</div>
</article>
<p>Carnet associé au projet de recherche-création « Vers une théorie-pratique de l’excès de fiction: distorsions, disjonctions et déviations des lignes narratives » dirigé par Cassie Bérard. CRSH - Programme de Développement Savoir. 2018-2020.</p>
</div>
<span><span lang="" about="http://quartierf.org/fr/user/23" typeof="schema:Person" property="schema:name" datatype="" xml:lang="">Cassie Bérard</span></span>
<span>mer 20/03/2019 - 15:23</span>
<div class="field field--name-field-citation field--type-text-long field--label-above">
<div class="field--label">Pour citer</div>
<div class="field--item"><p>Bérard, Cassie. Dussault, Antoine. Grenier, Pierre-Marc. Lafontaine, Marie-Pier. Lamarche, Jean-Philippe. Excéder la ligne. Carnet en ligne sur le site <em>Quartier F</em>. <a href="http://quartierf.org/carnet/exceder-la-ligne">http://quartierf.org/carnet/exceder-la-ligne</a></p>
<p> </p>
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Wed, 20 Mar 2019 19:23:36 +0000Cassie Bérard201 at http://quartierf.orgEntre trauma et création: le cas de Prairie Johnson dans la série The OA
http://quartierf.org/fr/article-dun-cahier/entre-trauma-et-creation-le-cas-de-prairie-johnson-dans-la-serie-oa
<span>Entre trauma et création: le cas de Prairie Johnson dans la série The OA</span>
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<div class="field--label">Auteur·e·s de l'article d'un cahier</div>
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<div class="field--item"><a href="http://quartierf.org/fr/complice/annie-gaudet" hreflang="fr">Annie Gaudet</a></div>
<div class="field--item"><a href="http://quartierf.org/fr/complice/marie-pier-lafontaine" hreflang="fr">Marie-Pier Lafontaine</a></div>
</div>
</div>
<span><span lang="" about="http://quartierf.org/fr/user/96" typeof="schema:Person" property="schema:name" datatype="" xml:lang="">Alec Serra-Wagneur</span></span>
<span>lun 21/01/2019 - 22:00</span>
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<div class="field--label">Cahier référent</div>
<div class="field--item"><a href="http://quartierf.org/fr/cahier/femmes-ingouvernables-postures-creatrices" hreflang="fr">Femmes ingouvernables: postures créatrices</a></div>
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<p>Écrite par Zal Batmanglij et Brit Marling, qui interprète aussi le rôle de la personnage principale, la série <em>The OA</em> met en scène la transformation de Prairie Johnson. D’une jeune femme non-voyante séquestrée au sous-sol d’un scientifique, Prairie recouvre la vue et devient OA, figure de résilience et de survie, mais surtout narratrice de son propre trauma. Après plus de sept années de captivité, la protagoniste est retrouvée par ses parents adoptifs par le biais d’images captées depuis un téléphone cellulaire et diffusées aux nouvelles.</p>
<p>Nous sommes à l’intérieur d’une voiture, roulant sur le tablier d’un grand pont. Une jeune femme, qui sera plus tard identifiée comme étant Prairie, court entre les voitures. Elle atteint la rambarde, l’enjambe, se retourne vers la caméra, puis saute. Telles sont les premières images de la série. Une première scène trompeuse, qui semble présenter une tentative de suicide, mais qui met plutôt en scène une tentative de <em>traversée</em>: la protagoniste tente, à travers une expérience de mort imminente, de franchir les frontières d’une autre dimension. Elle souhaite par là accéder au moyen de sauver les autres détenus.es du laboratoire de Haps, le kidnappeur. Produite en 2016 par Netflix, <em>The OA</em> explore de multiples façons la notion de <em>limites</em>. Limites de l’expérience humaine, puisque le scientifique noie à répétition ses prisonniers.ières dans l’objectif de percer le mystère des EMI, mais aussi limites temporelles, spatiales et diégétiques. Bien que le scénario reprenne une prémisse exploitée à maintes reprises, soit celle d’une femme séquestrée par un homme, OA y incarne une figure de créatrice plutôt que le portrait type de la victime. Afin de retracer les enjeux d’une telle posture, nous analyserons ses diverses fonctions au sein d’une réalité traumatique et la manière dont elle permet de subvertir à la fois les relations entre la victime et son bourreau qu’entre le réel et la fiction.</p>
<p><strong>L’insoumission de l’imaginaire de Prairie, aka OA.</strong> </p>
<p>Au sein d’une réalité traumatique, la fiction devient un mécanisme de survie et de résilience, une manière de lier autour de son <em>Je</em> l’expérience impossible de l’horreur (Pierre Lepage, 1998: II, cité dans Gasparini, 2008). Ainsi, la posture créatrice de la protagoniste de <em>The OA</em> lui permettrait de donner sens à ce qui relève, dans un contexte de coercition et de torture, de l’insoutenable, du chaos. Être confrontée à l’horreur, y être avalée, propulse dans l’écriture de soi, dans la création, puisqu’elle deviendra le prisme par lequel (se) prouver que <em>Je</em>, bien qu’un homme ait tenté de l’abolir, bien qu’il faille le recomposer, demeure possible. Lieu d’insoumission à la captivité mentale, l’imaginaire de Prairie aura pour fonction, une fois retournée dans sa famille adoptive, d’échapper aux fictions collectives<a class="see-footnote" id="footnoteref1_adcodbd" title="«Puisque le réel n’est qu’une somme de fictions collectives, de la cellule familiale à la saturation des fables médiatiques, politiques, sociales, économiques, écrire sa fiction propre, dans ce même réel, pas seulement par le biais de la littérature, était la seule réponse efficiente, le seul geste, la seule action possible» (Chloé Delaume, 2012: 2e paragraphe)." href="#footnote1_adcodbd">1</a>. C’est-à-dire qu’une fois prise en charge par le discours des policiers, des psychiatres, des journalistes ou de ses parents, Prairie deviendra le personnage passif d’une histoire racontée par d’autres, d’un drame imaginé et interprété sans elle, en dehors de ses perceptions intimes –et parfois même à leur encontre. La posture créatrice de Prairie est donc double. Dans la phase post-traumatique, elle prend la forme d’une autofiction alors qu’elle narre elle-même le récit des événements. Dans le temps du trauma, par l’invention de cinq mouvements, de cinq gestes censés ouvrir un portail vers une autre dimension, elle prend plutôt la forme de performances corporelles. Bien que ces deux modalités procèdent des mêmes fonctions, soit celles d’<em>échappée</em>, de <em>résistance</em> et de <em>subjectivation</em>, les enjeux de chacune sont pourtant distincts.</p>
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<div class="field--label sr-only">Légende / Description</div>
<div class="field--item"><p>(épisode 5)</p>
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</article>
<p>Lors de sa détention dans l’une des cinq cages en verre du laboratoire du scientifique, Prairie, alimentée de nourriture pour chien et noyée à répétition («On est tous mort plus de fois que je ne saurais les compter» (Marling et Batmanglij, 2016: épisode 1)) mettra son corps au service de la créativité. Il deviendra l’un des cinq mouvements, une pièce de la partition symbolique créée par le groupe et censée les libérer. Alors que chacun.e gravera sur sa peau une partie seulement de la composition –sous forme de signes et de symboles que le bourreau ne saurait déchiffrer–, chacun.e dépasse les limites de son être pour devenir le membre d’une unité, d’un organisme collectif. La modulation chorégraphiée dans l’espace de cette entité, une fois les énergies soumises au contrôle de la volonté, structurées et regroupées, transformera le corps en vecteur de liberté. Il y a dans l’intensité de chaque geste, une fois le corps lancé au bout de lui-même, quelque chose qui se rapproche du cri. De la même manière que le laissent supposer les symboles figuratifs, le cri permet d’échapper «à la logique contraignante de la signification» (Alain Milon, 2010: 44), de la refuser, afin d’atteindre un ailleurs dans le sens, ou du moins, son paroxysme. Et si l’on considère comme Nicole Brossard que l’intensité «ressemble à une force par laquelle nous dépassons la mesure ordinaire, la norme» (Nicole Brossard, 1985: 96), ce sont les performances corporelles dans <em>The OA</em> –aussi bien celles incarnées par les prisonniers.ières que celles pratiquées, comme nous le verrons, par les membres de la famille «fabriquée» d’OA– qui permettent de repousser les limites du réel, d’ouvrir en leur sein une voie d’accès à l’inédit, au sensible. Les actes de danse contemporaine entament ainsi la réalité traumatique. Ils altèrent les balises que le scientifique a scrupuleusement définies autour de ses cobayes. C’est-à-dire que la redéfinition subjective des actions du corps de Prairie, du rôle et de la valeur de ses déplacements dans le scénario prédéterminé, arrache la jeune femme de l’emprise psychologique de Haps.</p>
<p>Le trauma, selon la psychanalyste Anne Dufourmantelle, «est un ravissement négatif. Le sujet est ravi à lui-même, son moi ne gouverne plus, il est emporté, démâté […]» (2013: 120). Dans une situation traumatique, la victime, capturée par la toute-puissance de l’agresseur, est désertée d’elle-même, arrachée de ce qui, dans son être, soutenait ses liens au monde. La personne, fracturée, expérimente dès lors la déflagration «des coordonnées imaginaires et identificatoires qui [la] soutenaient […] à telle place symbolique et imaginaire» (Olivier Douville, 2003: 83). Les cadres de référence subjectifs qui lui servaient à appréhender le monde auront été abolis. La victime ne s’appartient plus. Toutefois, dans la série de Netflix, OA est davantage présentée comme une créatrice qu’une victime: elle construit un monde imaginaire interne au contexte traumatique (duquel la cohérence des codes et du langage dépend). Elle opère ainsi un renversement par lequel la part d’inouï du trauma, au lieu de la mener à sa perte, sera mise au service de sa propre fiction.</p>
<blockquote>
<p>On doit essayer d’entrer. On se comporte comme des rats de laboratoire. Les rats de laboratoire sont impuissants, parce qu’ils ne comprennent pas qu’ils font partie d’une expérience. Mais ils en font autant partie, si ce n’est plus que, que les scientifiques. On pourrait prendre le dessus. Son expérience, c’est notre porte de sortie (Marling et Batmanglij, 2016: épisode 4).</p>
</blockquote>
<p>En considérant autrement les rapports de force entre les objets observés et le scientifique, la jeune femme modifie la trajectoire de sa trame narrative. Par exemple, les meurtres par noyade infligés à répétition aux membres de l’étude, dans la nouvelle vérité conçue par ces derniers, ne serviront plus de prétexte immonde à l’avancement des connaissances sur les expériences de mort imminente. Le pouvoir change de main. Et la torture devient un chemin de traverse, un passage vers les mouvements censés leur permettre d’ouvrir une autre dimension, puisqu’ils ne pourront accéder aux gestes qu’une fois traversés du côté de la mort. En refusant l’aliénation, en ne se coupant pas d’elle-même («Je suis restée présente tout du long. Durant les sept ans, trois mois et onze jours que ça a duré» (épisode 1)), ni de la réalité traumatique, mais en la remodelant depuis l’intérieur, en transformant la signification de ses paramètres, la protagoniste réussit à s’éloigner des bords tranchants de la folie, voire à conjurer les pouvoirs de l’horreur, à survivre. Contrairement à ce qu’on pourrait s’attendre d’une personne séquestrée, OA règne en elle-même en lieu et place du geôlier. <em>Je</em> gouverne son être, comme une pulsion, une volonté. Elle devient, au cœur même de l’expérience scientifique, l’élément imprévisible: une force indomptable, une menace, une bombe. OA s’annonce donc dans la série «comme le pouvoir qui affranchit, la force qui écarte l’oppression du monde» (Maurice Blanchot, 1955: 70) et sa violence inhérente. Elle terrifie. En compromettant l’équilibre des structures et des dynamiques de sa situation –situation qui ne fait que rejouer autrement les codes sociaux de la domination, ceux-là mêmes qui lancent des enfants armés dans les écoles– OA terrifie. Tous.tes et chacun.e, d’ailleurs, à un moment où à un autre de l’histoire, tenteront de la dompter: elle sera encagée, gavée de médicaments, assignée à résidence, surveillée, molestée et coupée de son intimité. La jeune femme sera aussi giflée, attaquée par un chien, insultée, poignardée avec un crayon, accusée de folie, tuée, tuée et encore tuée.</p>
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<div class="field--label sr-only">Légende / Description</div>
<div class="field--item"><p>(épisode 6)</p>
</div>
</div>
</div>
</article>
<p>Tandis qu’au moment de la captivité de Prairie, la créativité et l’imagination permettent aux victimes d’acquérir une dose de liberté par rapport à la domination psychologique du bourreau, une fois la jeune femme libérée, c’est-à-dire de retour au Michigan dans la maison de ses parents adoptifs, l’imaginaire féminin la sauvera plutôt d’une certaine forme d’aliénation sociale et familiale alors que diverses fictions, hypothèses et conjectures circuleront à son sujet. Tout au long de la série, la protagoniste sera confrontée, de près ou de loin, aux curiosités entourant sa disparition. Dès le premier épisode, on peut entendre des journalistes débattre sur sa (possible ou non) résilience: «Est-ce que cette jeune fille pourra retrouver une vie normale ou restera-t-il toujours quelque chose…». Une adolescente l’approchera aussi pour lui témoigner son admiration, lui révélant au passage sa propre interprétation du trauma: «Vous m’inspirez beaucoup. Je vous jure. Après tout ce que vous avez subi. Être battue comme ça et sûrement violée. J’arrive même pas à imaginer» (épisode 7). Dans ce contexte, le changement de nom de Prairie, qui souhaite désormais être appelée OA, s’apparente au «second commencement» dont parle l’autrice Chloé Delaume dans son essai <em>La règle du Je</em>:</p>
<blockquote>
<p>Je m’appelle aujourd’hui parce que j’ai imposé un second commencement. Où la fiction toujours s’entremêle à la vie, où le réel se plie aux contours de ma fable. Celle que j’écris chaque jour, dont je suis l’héroïne. Mon ancien <em>Je</em> par d’autres se voyait rédigé, personnage secondaire d’un roman familial et figurante passive de la fiction collective. Me réapproprier ma chair, mes faits et gestes comme mon identité ne pouvait s’effectuer que par la littérature. Je ne crois plus en rien, si ce n’est en le Verbe, son pouvoir tout-puissant et sa capacité à remodeler l’abrupte (2010: 6).</p>
</blockquote>
<p>Changer son nom, comme elle aurait laissé derrière elle une peau morte, et se faire narratrice de sa propre histoire, offre à la narratrice la possibilité de se faire advenir en tant que sujet. En refusant de céder aux pouvoirs d’anéantissement et de fixation de la frayeur, en choisissant la mise en récit des événements plutôt que le mutisme, OA réussit à remodeler son <em>Je</em>, et ce, d’une manière subjective, singulière et inédite. Le déploiement narratif «de faits et d’événements si strictement réels que le Je ne sait que s’y cogner» (Delaume, 2010: 51) prend la forme d’une fiction dans la série, d’une autofiction. Elle replonge en toute conscience dans ses souvenirs dans l’objectif très précis de partager et de transmettre son expérience aux locuteurs.trices qu’elle aura elle-même choisis.es. Et à travers le jeu sur des procédés littéraires, tels que le suspense, la rétention d’informations ou encore les variations sur la voix, l’intensité, le rythme, OA transforme la détresse inhérente à l’évocation du trauma en force à <em>moduler</em>, plutôt que <em>modulante</em>; elle se réapproprie sa propre histoire. Dès lors, la création dans la phase post-traumatique permet à la victime une reprise en charge de son agentivité, de sa puissance d’agir, mais aussi de reconstruire des liens avec le monde. Cette posture créatrice mise en place dans l’œuvre de Marling et de Batmanglij, qui traverse d’un niveau diégétique à l’autre, s’avère donc multiforme, mais toujours portée par le même désir d’exister absolument.</p>
<p><strong>Vérité et mensonge dans la fiction: la création et l’interprétation</strong><br />
<br />
La posture créatrice investie par OA aura des impacts sur la réalité diégétique des autres personnages. Fabulée ou vécue, l’histoire de cette protagoniste influence le cours du réel et renverse par le fait même des oppositions conceptuelles figées. Il semble que la série <em>The OA</em> joue constamment sur la frontière entre vrai et faux ainsi qu’entre réalité et fiction.</p>
<p>Comme nous l’avons précisé, la série présente deux temporalités distinctes, soit le temps de la séquestration et le temps du post-trauma, lequel met principalement en scène le témoignage d’OA. Histoire dans une histoire, fiction dans une fiction, <em>The OA</em> présente une mise en abyme de l’acte de transmission lui-même. Dans son essai <em>Le récit spéculaire</em>, Lucien Dällenbach définit la mise en abyme comme «tout miroir interne réfléchissant l’ensemble du récit» (1977: 52). Dällenbach identifie plusieurs mise en abyme dont celle de <em>l’énonciation</em> qu’il définit comme «la narration mise au jour» (100). Cette locution, «mise au jour», est à considérer dans son sens premier comme «faire apparaître ce qui est caché». Cette mise en abyme dévoile donc le processus de transmission d’une fiction en représentant «l’agent et le procès de cette reproduction même» (100). Comme le processus de transmission est composé de trois éléments, l’objet raconté, le transmetteur et le récepteur, il s’avère que sans l’un des éléments de cette triade la «transmission » échoue. La fiction ne met que très peu en scène le récepteur qui s’incarne plutôt dans le lecteur/le spectateur. En fait, la représentation de ce récepteur à même la fiction crée la mise en abyme de l’énonciation. Celle-ci vise donc à «rendre l’invisible visible» (1977: 100), c’est-à-dire, dans l’œuvre de Marling et de Batmanglij, à montrer le récepteur de l’histoire de la protagoniste. Dans le temps du post-trauma, un groupe composé de quatre étudiants et d’une professeure fait office de ce récepteur. En recevant le témoignage d’OA, ce sont eux qui interprètent son histoire et qui cherchent à prouver la véracité des événements vécus.</p>
<p>Dans la série <em>The OA</em>, le récepteur s’incarne davantage dans la famille –entendue non pas comme celle qui est donnée ou imposée à la naissance, mais comme celle qui se choisit– que dans chaque individu mis en scène. Les deux familles, les deux groupes qui se forment dans la diégèse, soit le groupe emprisonné dont fait partie OA et celui formé par les jeunes étudiants et la professeure sont composés d’individus solitaires et souffrants. Alors que le premier groupe a en commun d’avoir vécu plusieurs expériences de mort imminente et, pour cette raison, d’être tous et toutes les prisonniers.ières de Haps, le second n’a en commun que le fait de fréquenter la même école. Ils n’entretiennent pas d’affinité les uns envers les autres: ce sont des individus blessés qui ne bénéficient d’aucune stabilité familiale. C’est pourtant à ceux-ci qu’OA décide de raconter son histoire.</p>
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<div class="field--label sr-only">Légende / Description</div>
<div class="field--item"><p>(épisode 7)</p>
</div>
</div>
</div>
</article>
<p>Loin du foyer familial, la protagoniste donne rendez-vous aux cinq individus dans une maison abandonnée en cours de construction lors de la dernière crise économique. Alors qu’elle déambulait entre ces maisons délabrées, OA constate que «si le projet n’était pas tombé à l’eau, une famille aurait habité ici: les disputes dans la cuisine, la naissance des enfants, les chagrins, le sexe» (Marling et Batmanglij, 2016: épisode 2). Loin de cette famille nucléaire que s’imagine OA, les cinq personnages du groupe deviendront pourtant la famille «fabriquée» d’OA: celle à qui elle se confiera. Le témoignage d’OA, en ce sens, est le seul élément pouvant réellement les unir. La fiction, c’est-à-dire l’histoire que raconte OA, semble avoir la capacité de rassembler ces individus aux horizons divers. Au fil de l’évolution des épisodes, un sentiment d’appartenance se crée entre eux: ils commencent à s’entraider et à prendre soin les uns des autres. Il semble que ce récit réflexif permette en effet, à l’instar de ce que souligne Dällenbach, de «rendre visible l’invisible»: en nous montrant la formation de cette «famille», la série rend visible la construction d’une «communauté interprétative».</p>
<p>Dans son essai <em>Quand lire, c’est faire. L’autorité des communautés interprétatives</em>, Stanley Fish postule que «l’interprétation n’est pas l’art d’analyser, mais l’art de construire» (s. d.). Comme une œuvre analysée toujours <em>a posteriori</em> et non pas de manière simultanée à la lecture, l’histoire racontée par OA est interprétée une fois que cette dernière met fin à son récit. La communauté interprétative présente dans la série prend réellement forme une fois l’histoire d’OA achevée, c’est-à-dire lorsque la temporalité de la séquestration aura complètement été racontée dans la temporalité post-traumatique. Dès lors, cette communauté tentera de prouver la «véracité» de son histoire, puisqu’elle sera remise en cause.</p>
<p>Deux communautés interprétatives se confrontent dans <em>The OA</em>. Alors que l’une d’entre elles considère que l’histoire d’OA est le fruit de son imagination, une «simple» réaction post-traumatique, l’autre –la famille «fabriquée» d’OA– croit que les événements narrés lui sont réellement arrivés. Le groupe formé notamment par les parents d’OA et les policiers n’a jamais entendu le témoignage de leur fille sur sa captivité. Il tente donc d’invalider son expérience. À l’égard de cette interprétation, la communauté interprétative composée des jeunes étudiants et de la professeure tente donc de démontrer, par des éléments de preuve, la véracité de son témoignage. Les frontières entre réalité et fiction, vérité et fausseté se voient brouillées lors de la rencontre entre les deux groupes dans l’épisode final.</p>
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<div class="field--item"><a href="https://quartierf.org/sites/qf.aegir8.uqam.ca/files/2019-02/OA%204%20%28%C3%A9pisode%208%29.png" title="<p>(épisode 8)</p>
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<div class="field--label sr-only">Légende / Description</div>
<div class="field--item"><p>(épisode 8)</p>
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</div>
</article>
<p>Cette famille «fabriquée» passe près de se dissoudre lorsque leur enquête les mène à découvrir des livres dans la chambre d’OA qui correspondent tous à un élément de l’histoire qu’elle leur a racontée. En montrant sa découverte aux autres membres, Alfonso soutient ainsi qu’OA «nous a raconté une histoire. Le seul truc, c’est que rien n’était vrai» (Marling et Batmanglij, 2016: épisode 8). Dès cet instant, la communauté cesse de se rassembler. Puisque la fiction est le seul élément qui les lie les uns aux autres et que celle-ci ne s’avère plus fondée, le groupe se défait.</p>
<p>La série pose les jalons d’une réflexion sur le couple oppositionnel réalité/fiction qui suppose que la réalité (appartenant au domaine du réel) est marquée par la vérité alors qu’en opposition la fiction (liée au domaine de l’imaginaire) est fictive. Cette trop brève démonstration des couples oppositionnels au cœur du débat entre réalité et fiction est certes, loin de présenter l’ampleur des recherches sur cette question, mais situe les bases d’un faux débat dans la série: la scène finale de <em>The OA</em> révèle que les enjeux de la communauté interprétative résident moins dans sa capacité à déceler la part de vérité ou de fausseté dans l’histoire racontée, que dans sa capacité à influer sur le réel à partir de sa lecture. Si Stanley Fish relève que «l’interprétation n’est pas l’art d’analyser, mais l’art de construire» (s. d.), nous pensons, dès lors, cet «art de construire» comme un «art de la création».</p>
<p>Dans l’après-coup du trauma, la création devient à la fois le lieu d’une mise en récit de soi et le lieu d’une survivance. Cinq mouvements, ceux-là même découverts par OA et ses codétenu.es lors de leur captivité, sont enseignés aux membres de la «nouvelle famille». Véritable langage, ces mouvements, leur apprend-elle, leur permettraient de voyager à travers les dimensions temporelles, vers «leur liberté» à tous.</p>
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<div class="field--item"><a href="https://quartierf.org/sites/qf.aegir8.uqam.ca/files/2019-02/OA%205%20%28%C3%A9pisode%208%29.png" title="<p>(épisode 8)</p>
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<div class="field--label sr-only">Légende / Description</div>
<div class="field--item"><p>(épisode 8)</p>
</div>
</div>
</div>
</article>
<p>À l’instar d’OA, les étudiants et la professeure s’en arment afin de se libérer d’une situation critique et mortelle. Alors qu’un homme armé d’un fusil entre dans la cafétéria de l’école qu’ils fréquentent, ceux-ci se mobilisent pour leur survie, mais aussi pour celle de tous les étudiants présents: ensemble, ils performent les cinq mouvements appris et détournent ainsi l’attention du tireur. Comme ces mouvements auront permis aux prisonniers.ières de survivre à la réalité traumatique, ils leur permettront, à leur tour, de se soustraire au joug du tireur. Dans ce contexte, la création devient donc vectrice d’une survivance tout en participant à la réhabilitation de cette communauté interprétative.</p>
<p>Ce nouveau langage ouvre-t-il réellement des portes au travers des dimensions? Les expériences de mort imminentes existent-elles? L’histoire d’OA est-elle réellement arrivée? Bien que ces questions demeurent sans réponse, les cinq membres du groupe performent ensemble un langage dont ils ne possèdent ni le code ni le sens. Envisagés comme des «signes», ces mouvements sont des «signifiants» opaques pour cette communauté, comme pour nous, spectateur.trice, puisqu’ils nous sont à tous inintelligibles. Les cinq membres ne détiennent pas les codes pour déchiffrer le «signifié» de ces mouvements; le seul «signifié» qu’ils possèdent est donc celui qu’ils inventent, celui qu’ils créent. Mais, au fond, cette scène finale révèle qu’il importe peu pour les membres de cette communauté de déterminer de la signification de ces gestes, puisque, performés par le corps, ces mouvements deviennent vecteurs d’une puissance d’évocation qui dépasse le langage. Ils ouvrent une brèche dans les lois arbitraires de la signification.</p>
<p>En ce sens, <em>The OA </em>révèle le pouvoir que possède la fiction sur le réel. En ne sachant ni le sens de ce langage, ni le vrai, ni le faux dans l’histoire d’OA, la seule information que possède cette communauté interprétative, est son interprétation, sa réception de l’histoire. Arbitraire, certes, celle-ci les amènera tout de même à influer sur le réel et à survivre à la fusillade.</p>
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<div class="field field--name-field-legende-description field--type-text-long field--label-visually_hidden">
<div class="field--label sr-only">Légende / Description</div>
<div class="field--item"><p>(épisode 7)</p>
</div>
</div>
</div>
</article>
<p><strong>Posture indomptable</strong><br />
<br />
L’intérêt d’une telle série, d’un point de vue féministe, repose sur la mise en place d’une alternative à la figure de la victime, mais aussi, sur l’importance accordée aux pouvoirs de la création, à la réalité telle que nous la connaissons. En retraçant les enjeux de la posture créatrice d’OA, nous avons pu constater les divers mécanismes à l’œuvre dans son processus de survie et de résilience. Nous avons donc pensé les couples conceptuels réalité/fiction, vérité/fausseté, notamment au sein de la mise en abyme de l’acte de transmission et de la construction d’une communauté interprétative, dans l’objectif très précis de démontrer qu’au final, ils importent peu à l’intérieur d’une logique traumatique, dans la mesure où l’impact sur le réel et sur les victimes n’en sera pas moins grand, du moins dans l’univers de <em>The OA</em>. Il nous a aussi semblé inédit qu’une œuvre télévisuelle présente la parole d’une femme avec autant d’agentivité, qu’elle en fasse le moteur de l’action, le liant entre les personnages et les chapitres. La force d’une série telle que <em>The OA</em> tient à la sensibilité, à l’indomptabilité de l’imaginaire féminin et, surtout, si l’on repense à la scène finale, à la capacité de cet imaginaire à refuser la violence du monde, à la confronter, voire à la dominer.</p>
<ul class="footnotes"><li class="footnote" id="footnote1_adcodbd"><a class="footnote-label" href="#footnoteref1_adcodbd">1.</a> «Puisque le réel n’est qu’une somme de fictions collectives, de la cellule familiale à la saturation des fables médiatiques, politiques, sociales, économiques, écrire sa fiction propre, dans ce même réel, pas seulement par le biais de la littérature, était la seule réponse efficiente, le seul geste, la seule action possible» (Chloé Delaume, 2012: 2e paragraphe).</li>
</ul>
</div>
<div class="field field--name-field-citation field--type-text-long field--label-above">
<div class="field--label">Pour citer</div>
<div class="field--item"><p>Gaudet, Annie et Lafontaine, Marie-Pier. 2019. Entre trauma et création: le cas de Prairie Johnson dans la série The OA. <em>Femmes ingouvernables: Postures créatrices</em>. Cahier virtuel. Numéro 5. En ligne sur le site <em>Quartier F</em>. <a href="http://quartierf.org/fr/article-dun-cahier/entre-trauma-et-creation">http://quartierf.org/fr/article-dun-cahier/entre-trauma-et-creation</a></p>
</div>
</div>
<div class="field field--name-field-ref-biblio field--type-text-long field--label-visually_hidden">
<div class="field--label sr-only">Référence bibliographique</div>
<div class="field__items">
<div class="field--item"><p>Batmanglij, Zal (réalis.), Batmanglij, Zal et Marling, Brit. (aut.). 2016. <em>The OA</em> [Série télévisée]. États-Unis: Plan B Entertainment et Anonymous Content.</p>
</div>
<div class="field--item"><p>Blanchot, Maurice. 1955. <em>L’espace littéraire</em>. Paris. Gallimard.</p>
</div>
<div class="field--item"><p>Brossard, Nicole. 1985. <em>La lettre aérienne</em>. Montréal. Remue-Ménage. </p>
</div>
<div class="field--item"><p>Dällenbach, Lucien. 1977. <em>Le récit spéculaire. Essai sur la mise en abyme</em>. Paris. Seuil.</p>
</div>
<div class="field--item"><p>Delaume, Chloé. 2010. <em>La règle du Je: autofiction, un essai</em>. Paris. Presses universitaires de France.</p>
</div>
<div class="field--item"><p>Delaume, Chloé, 2012. Le soi est une fiction: Cloé Delaume s’entretient avec Barbara Havercroft. <em>Revue critique de fixxion française contemporaine</em>. Récupéré de <a href="http://www.revue-critique-de-fixxion-francaise-contemporaine.org/rcffc/article/view/fx04.12/671#ap1">http://www.revue-critique-de-fixxion-francaise-contemporaine.org/rcffc/…</a></p>
</div>
<div class="field--item"><p>Douville, Olivier. 2003. Du choc au trauma… il y a plus d’un temps. <em>Figures de la psychanalyse</em>. Vol 8. p. 83-96.</p>
</div>
<div class="field--item"><p>Dufourmantelle, Anne. 2013. <em>Puissance de la douceur</em>. Paris. Éditions Payot & Rivages.</p>
</div>
<div class="field--item"><p>Fish, Stanley. S. D. Comment reconnaître un poème quand on en voit un. <em>Vox-Poetica. Lettres et sciences humaines</em>. Récupéré de <a href="http://www.vox-poetica.org/t/articles/fish.html">http://www.vox-poetica.org/t/articles/fish.html</a></p>
</div>
<div class="field--item"><p>Gasparini, Philippe. 2008. <em>Autofiction: une aventure du langage</em>. Paris. Éditions du Seuil.</p>
</div>
<div class="field--item"><p>Milon, Alain. 2010.<em> La fêlure du cri: violence et écriture</em>. Paris. Belles-Lettres.</p>
</div>
</div>
</div>
Tue, 22 Jan 2019 03:00:46 +0000Alec Serra-Wagneur188 at http://quartierf.orgJ.
http://quartierf.org/fr/entree-de-carnet/j
<span>J.</span>
<div class="field field--name-field-auteur-entree-carnet field--type-entity-reference field--label-above">
<div class="field--label">Auteur·e·s de l'entrée de carnet</div>
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<div class="field--item"><a href="http://quartierf.org/fr/complice/catherine-anne-laranjo" hreflang="fr">Catherine Anne Laranjo</a></div>
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</div>
<span><span lang="" typeof="schema:Person" property="schema:name" datatype="" xml:lang="">Anonyme</span></span>
<span>ven 28/12/2018 - 10:32</span>
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<div class="field--label">Carnet référent</div>
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<div class="field--item"><a href="http://quartierf.org/sites/qf.aegir8.uqam.ca/files/2018-12/J.%20.jpg" title="<p>Crédits: Alexandros Tzortzis (Instagram: @alexandrostzortzis)</p>
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<div class="field--label sr-only">Légende / Description</div>
<div class="field--item"><p>Crédits: Alexandros Tzortzis (Instagram: @alexandrostzortzis)</p>
</div>
</div>
</div>
</article>
<p>He stands in front of the living room television, staring at a black screen<br />
His hand crooked on his lower back<br />
Occasionally twitching.<br />
His thumb is pointing North, towards the back of his skull<br />
His tee-shirt becomes a domestic territory ready for action.</p>
<p>His other hand holds the compass, a small black remote control.<br />
He presses buttons and sounds come out of them<br />
Like a secret melody him only would know. Maybe this note will make the soccer game appear at last <br />
Or, mistaken, the television will carry him to a shopping canal<br />
The ending credits of a Holiday movie<br />
A morning talk-show where women will laugh in love-seats<br />
Some tragic news<br />
A pedestrian recalling yesterday’s snow storm<br />
He is ready for anything.</p>
<p>Sometimes a corner of the black screen lightens and a tiny guy in me gets up, excited<br />
But the man doesn’t lose his cool. He’s in for the wait below zero, the mirages and the impossible mountains. Maybe it’s only a sparkle of light from the morning snow.<br />
In French we call this a <em>leurre</em><br />
He keeps staring at the dark void of possible.</p>
<p>Sometimes his hand reaches the back of his neck. His palm covers his nape and when a soft sight comes out of his mouth<br />
It’s a flag of patience.<br />
A refueling key.<br />
He’s in for the run.</p>
<p>I’m reading some foreign woman’s poems<br />
On the couch being him<br />
Looking for paper with my naked hands<br />
Thinking that maybe we’re exactly in the same hurry. <br />
</p>
</div>
Fri, 28 Dec 2018 15:32:05 +0000Anonyme166 at http://quartierf.orgA.
http://quartierf.org/fr/entree-de-carnet/a
<span>A.</span>
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<div class="field--label">Auteur·e·s de l'entrée de carnet</div>
<div class="field__items">
<div class="field--item"><a href="http://quartierf.org/fr/complice/catherine-anne-laranjo" hreflang="fr">Catherine Anne Laranjo</a></div>
</div>
</div>
<span><span lang="" typeof="schema:Person" property="schema:name" datatype="" xml:lang="">Anonyme</span></span>
<span>mer 05/12/2018 - 10:53</span>
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<div class="field--label">Date de publication de l'entrée</div>
<div class="field--item"><time datetime="2018-12-05T12:00:00Z">05/12/2018</time>
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<div class="field--label">Carnet référent</div>
<div class="field--item"><a href="http://quartierf.org/fr/carnet/les-gens" hreflang="fr">Les gens</a></div>
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<div class="field--item"><a href="http://quartierf.org/sites/qf.aegir8.uqam.ca/files/2018-12/A.%20nouveau%20format.jpg" title="<p>Crédits: Alexandros Tzortzis (Instagram: @alexandrostzortzis)</p>
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<div class="field field--name-field-legende-description field--type-text-long field--label-visually_hidden">
<div class="field--label sr-only">Légende / Description</div>
<div class="field--item"><p>Crédits: Alexandros Tzortzis (Instagram: @alexandrostzortzis)</p>
</div>
</div>
</div>
</article>
<p>J’ai pensé à toi<br />
La toi de maintenant à la frange normalisée au chignon haut et aux six piercings ornementaux<br />
J’ai pensé à toi qui portes des bas de nylon sous ses shorts <em>scrap</em>. La toi qui portes des pantalons trop grands sur des jambes de feu de paille et des t-shirts publicitaires sur tes seins de vedette pornographique que t’es pas sûre de vouloir faire voir.<br />
J’ai pensé à toi qui portes ton insigne-nom épinglé de travers sur ton uniforme de travail que t’es pas sûre de vouloir avoir<br />
Maintenant que tu es une grande adolescente pas sûre de grand-chose.</p>
<p>J’étais ailleurs quand j’ai pensé à la toi de maintenant qui offre son manteau d’hiver à une démunie. Qui cuisine des muffins aux sans-abris et offre la moitié de sa paye aux animaux malmenés mais prend tellement d’énergie et de temps à me haïr.<br />
Puisque penser à ça me brûlait un peu<br />
J’ai davantage pensé à la toi d’avant<br />
Avant le mascara avant l’acné l’anémie l’apathie et les tentatives de résolution, avant les garçons ou non. Avant les arcs-en-ciel trop vite dans les cheveux. Les cicatrices sur tes bras que tu penses qu’on a arrêté de voir avec le temps.<br />
Sache<br />
Qu’on voit tout<br />
Ce que t’es pas sûre de vouloir cacher<br />
Avec toi on a appris à regarder sans mourir.</p>
<p>Ça me brûlait quand même alors j’ai pensé à toi avant, toi bébé.<br />
Tes cheveux en bataille, courts et noirs<br />
Je les vois à chaque fois où «ébène» naît dans les mots croisés du journal.<br />
J’ai pensé à toi bébé<br />
Tes longs cils fermés sur tes paupières fripées<br />
Ton nez comme un flocon de neige écrasé dans la vitre<br />
Et l’aile de tes yeux au fond d’une chaloupe.<br />
Ta bassinette était blanche, ta literie bleue comme les amandes portugaises qu’ensemble on tète aux Fêtes.<br />
À ton réveil je te traînais dans le panier de lessive, blanc aussi, les planchers de bois chantaient, tu m’aimais<br />
Et tu respirais lentement, tu rêvais toujours.</p>
<p>Après j’ai fait un saut dans le temps<br />
Pour mieux t’aimer j’ai pensé à celle que tu serais dans mille années, au bord de la mort.<br />
La vulnérabilité est mon moteur d’amour favori.<br />
J’ai imaginé tes petits pieds emmêlés plus sûrs de comment se déposer<br />
Et tes incertitudes ont fait un pont des années<br />
Ta peau toujours aussi pâle sous la cellophane du temps qui passe<br />
Et tes yeux transparents, pleins d’espace.<br />
J’ai pensé à tes cheveux du futur, me suis demandé s’ils seraient blancs ou gris ou les deux<br />
Séparés sur le côté ou dans le milieu, ton chignon se serait-il allongé dans le bas de ta nuque, aurais-tu des rituels de tresses quotidiennes, retiendrais-tu tout ça d’un petit élastique transparent du Dollorama ou un gros frou-frou de velours rouge sang.<br />
Je me posais des questions sur tes cheveux à propos desquels tu ne cesses de t’interroger toi-même (la coiffeuse connaît ton numéro de téléphone par cœur vous vous textez vous commentez vos photos Facebook et vos nouvelles lunettes et vos coupes de toupet funky et vos ravages amoureux)<br />
Je tremblais je soupirais<br />
De ne pas arriver à te cerner le capillaire, te figer le futur chevelu à défaut d’autre chose.</p>
<p>J’étais censée te méditer<br />
Avant et après<br />
Pour que le présent s’allège<br />
Mais tes cheveux de fin de vie<br />
Peinaient à se peigner clairement dans ma tête.<br />
Ils sont comme ceux de ton adolescence d’aujourd’hui.<br />
Tes cheveux me mêlent.</p>
<p>Quand on a parlé de penser à une personne avec laquelle s’érige une difficulté, j’ai préféré et priorisé visualiser ton visage de poupée asiatique plutôt que celui du caissier à la librairie de l’université<br />
De la professeure pleine des poux de la dictature chilienne<br />
Mon père plein de rien<br />
Mon psychologue envolé<br />
C’est arrivé très rapidement je voyais clairement le ciel te passer à travers la tête via les yeux<br />
Bleus.<br />
Je voyais tes petites jambes de flamand rose, d’héron femelle, de quenouille africaine<br />
Ta dégaine<br />
Je tenais parfaitement l’image actuelle qu’assise ici je me fais de la toi actuelle sûrement étendue là-bas, en ville. Dans le sofa couleur peau du lapin qui est aussi ton petit copain<br />
Tu aimes surtout deux choses: être près de ce qui ne sait qu’aimer<br />
Ou de ce qui ne sait pas s’aimer tout seul.</p>
<p>On a parlé de penser à une personne avec qui c’est un peu difficile avec qui le bât blesse et j’ai bien vu immédiatement tout: ton visage de grain de tulle tes épaules gênées toute la largeur de tes clavicules, le ballet de tes cils. Tes vieux pantalons tes bas d’intérieur les motifs sur ta cape d’hiver.<br />
Tout ça j’ai bien vu, bien vu tout, sauf tes cheveux.<br />
Je n’arrivais plus à décider quelle teinte ils étaient devenus.<br />
Comment tu les avais rendus.<br />
<em>Bleachés</em> solide gris mauve lilas bleu brun caramel ou ton châtain naturel<br />
Je sautais d’une teinte à l’autre, c’était dérangeant dans ma pratique méditative de t’envoyer du <em>loving kindness</em> sérieusement.</p>
<p>Depuis qu’ils ne sont plus ébène<br />
Dans les flanelles de ton parc à bébé<br />
Quand je ferme les yeux je ne sais plus reconnaître tes cheveux<br />
Ton capillaire si précieux<br />
Est flou à mon cœur, ma sœur.</p>
<p>Quand j’ai eu besoin de marcher dehors j’ai choisi le stationnement du monastère<br />
Ai entamé le pas avec vivacité et bon allant, il fallait m’ébroussailler l’anxiété le regret et la peine qui vitriolent notre fenêtre communicante<br />
Marcher vite <em>shaker off</em> ce qui m’accidente dans l’incapacité répétée à te dessiner.<br />
Et bientôt, doucement<br />
Mon pas s’est ralenti<br />
Je t’attendais<br />
Presque sans faire exprès.<br />
Vous trottiez là, toi tes cinq ans et ton déficit d’attention gros comme le bras. Que comme tes cicatrices sur les bras beaucoup plus tard on a fait semblant d’arrêter de voir. Semblant.<br />
Vous trottiez là, toi tes couettes revirées par en dedans. Ta salopette de travers après la journée d’école. Ta boîte à lunch traînant sur le trottoir du chemin vers la maison.<br />
Tu étais là. Perdue au centre de tes yeux lents et ton imaginaire immense.<br />
Et cette fois-là au lieu de te crier après, je te criais tout le temps après, au lieu d’être l’adolescente qui ne savait pas mieux que j’étais, je t’attendais. Et même si le silence m’intimait au silence, je n’aurais quand même rien murmuré sauf: pardonne-moi que je te pardonne.</p>
<p>Dans le jour transparent j’ai monté le foulard blond sur mes joues mouillées<br />
Un caniche royal très pâle est passé devant moi et la neige blanche brillait blanche comme une bombonne chez le coiffeur<br />
Tu étais partout<br />
Et là je ne savais plus très bien<br />
Dans quelle catégorie de <em>beings</em> te classer ma sœur.</p>
</div>
Wed, 05 Dec 2018 15:53:24 +0000Anonyme161 at http://quartierf.orgM.2
http://quartierf.org/fr/entree-de-carnet/m2
<span>M.2</span>
<div class="field field--name-field-auteur-entree-carnet field--type-entity-reference field--label-above">
<div class="field--label">Auteur·e·s de l'entrée de carnet</div>
<div class="field__items">
<div class="field--item"><a href="http://quartierf.org/fr/complice/catherine-anne-laranjo" hreflang="fr">Catherine Anne Laranjo</a></div>
</div>
</div>
<span><span lang="" typeof="schema:Person" property="schema:name" datatype="" xml:lang="">Anonyme</span></span>
<span>jeu 01/11/2018 - 16:26</span>
<div class="field field--name-field-date-publication-entree field--type-datetime field--label-above">
<div class="field--label">Date de publication de l'entrée</div>
<div class="field--item"><time datetime="2018-03-11T12:00:00Z">11/03/2018</time>
</div>
</div>
<div class="field field--name-field-carnet-referent field--type-entity-reference field--label-above">
<div class="field--label">Carnet référent</div>
<div class="field--item"><a href="http://quartierf.org/fr/carnet/les-gens" hreflang="fr">Les gens</a></div>
</div>
<div class="field field--name-body field--type-text-with-summary field--label-hidden field--item"><article class="embedded-entity"><div class="view-mode-image_embed_pleine_largeur">
<div class="field field--name-field-media-image field--type-image field--label-visually_hidden">
<div class="field--label sr-only">Image</div>
<div class="field--item"><a href="http://quartierf.org/sites/qf.aegir8.uqam.ca/files/2018-06/M.%202.%20Photographie%20pour%20Les%20gens.%20Laranjo.jpg" title="<p>Crédits: Alexandros Tzortzis (Instagram: @alexandrostzortzis)</p>
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</a>
</div>
</div>
<div class="field field--name-field-legende-description field--type-text-long field--label-visually_hidden">
<div class="field--label sr-only">Légende / Description</div>
<div class="field--item"><p>Crédits: Alexandros Tzortzis (Instagram: @alexandrostzortzis)</p>
</div>
</div>
</div>
</article>
<p>Les pieds plats lui font du bien<br />
Le sourcil qui dépasse ne peut pas changer<br />
La ceinture doit être marron et le médecin une femme.</p>
<p><br />
Elle parle de ce qu’elle écrit comme de scènes<br />
Elle la découpe pour que la vie soit vivable nomme les rideaux de velours et les murs de peaux<br />
Trouve ça plus fort quand elle se divise et baisse la tête en s’épelant.</p>
<p><br />
Elle s’excuse de dire ce qu’il faut elle va bientôt changer son nom de gazon pour la rivière<br />
J’ai envie de lui toucher la tempe de ma paume laisser mes doigts lui dire qu’elle est une clairière<br />
Pénétrable qui se renouvelle.</p>
<p><br />
Elle attend les papiers qui lui expliqueront qu’elle a encore le droit de vivre<br />
Dessus on lira qu’elle ne ressemble pas une seconde à celui qui la purge d’elle-même<br />
Je n’y crois pas je veux dire: nous portons les morceaux de nos pères arrangés différemment<br />
Je voudrais lui parler de la manipulation travestie, des escroqueries que j’ai rafraîchies, de son mensonge que j’utilise en étoiles<br />
Je voudrais lui parler des deux lames d’un seul outil. Du même pour le différent des deux manières d’en faire trois je voudrais lui dire de tout vomir sur la table du restaurant où les vedettes se réunissent je voudrais qu’elle dise merci mais non merci à ce qui l’empêche de réorganiser la maison avec ses doigts<br />
Mais on lui a demandé de garder la carte du criminel au cas où ça cogne la nuit, on la retient devant la fourche, les pouces attachés.</p>
<p><br />
Quand la journée s’éteint elle déballe une page fripée et tâte le côté de sa cuisse<br />
Elle est prise entre le feu et la lune elle hurle en mordant la lèvre d’en bas<br />
Elle dit j’ai écrit ça<br />
Ce n’est ni très long ni très bon<br />
Et chaque <em>on</em> est souffrance<br />
Elle se met à lire ce qui arrive<br />
Et chaque ligne chemine jusqu’aux perles<br />
Je veux dire la mienne je veux dire la nôtre je veux dire que la mare s’étend<br />
Ça fait longtemps que la douleur lui fait peur très peur<br />
Mais maintenant quand elle raconte le mal comme un film mon cœur se serre sans s’enfuir dans mes omoplates<br />
Mon ventre reste au milieu mes yeux ne tombent plus vers mon nez<br />
Mes sourcils se tiennent tranquilles, couchés, et mes lèvres ne se touchent plus.<br />
Maintenant je voudrais<br />
Lui prêter chaque trait de mon visage (nos pères s’y tresseraient, muets, ce sont nous qui avons les mots)<br />
Je les déposerais doucement sur sa peau pâle la gaverais du soleil un peu blessé qui se tient parce qu’on l’y aide</p>
<p><br />
<em>J’ai le privilège de faire partie de nous</em></p>
</div>
Thu, 01 Nov 2018 20:26:37 +0000Anonyme89 at http://quartierf.orgV.
http://quartierf.org/fr/entree-de-carnet/v
<span>V.</span>
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<div class="field--item"><a href="http://quartierf.org/fr/complice/catherine-anne-laranjo" hreflang="fr">Catherine Anne Laranjo</a></div>
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<span><span lang="" typeof="schema:Person" property="schema:name" datatype="" xml:lang="">Anonyme</span></span>
<span>lun 01/10/2018 - 16:10</span>
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<div class="field--label">Date de publication de l'entrée</div>
<div class="field--item"><time datetime="2018-03-11T12:00:00Z">11/03/2018</time>
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<div class="field--label sr-only">Légende / Description</div>
<div class="field--item"><p>Crédits: Alexandros Tzortzis (Instagram: @alexandrostzortzis)</p>
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</article>
<p>Tu t’assois derrière un bureau d’école<br />
Dessus tu déposes le bout de tes doigts de fille<br />
Que tu as découpés soigneusement cette nuit<br />
Tu couches ton cœur tes intestins<br />
Ta rate<br />
Pis deux trois<em> stripes</em> de tes fascias<br />
Que tu penses avoir choisis tout seul.</p>
<p><br />
Le tas de tes membres pulse comme une gomme à effacer fâchée<br />
Tu regardes ça<br />
De tes yeux qui se parlent en codes secrets<br />
On te regarde<br />
De nos yeux qui ne comprennent pas tout de suite<br />
Et par-dessus l’offrande de tes précieux organes<br />
Tu garoches une chape de plastique bleue comme en camping sauvage quand tu sors tout nu dans l’orage même si tes bras tremblent dans la pluie<br />
Tes bras tremblent d’un froid qu’on appelle aussi l’effroi<br />
L’été et l’hiver et au centre du feu, à la pointe du monde et à l’île de la Réunion, toujours tu as<br />
De tout petits tout<br />
Petits bras.</p>
<p><br />
Aujourd’hui tu les caches<br />
Dans tes chandails de vieille laine amérindienne pleine de trous<br />
Tu ne les vois pas<br />
Les trous<br />
Tu t’imagines étanche et consciemment ficelé c’est ainsi que tu peux déposer<br />
Une partie de ton dedans devant nous et garder l’autre pognée dans ta personnalité de poète de grange calculé. Tes fins de phrases chantent de désinvestissement tu trouves la mi-juin <em>particulièrement </em><em>intéressante</em> tu brouilles le sarcasme comme des omelettes le dimanche<br />
En-dessous de la recette tu<br />
T’en fous pas tant que ça<br />
Dans tes yeux on la voit de loin, l’envie d’être<br />
Un petit œuf de région<br />
Fouetté tendrement, fourré avec soin, mangé avec le bout des mains<br />
En-dessous de tes manches<br />
Tes radius sont des petits gars<br />
Et devant ton spectacle<br />
Ma voix de tulle perce l’espace<br />
Et rougit de te gêner<br />
Et derrière tes cheveux mêlés par exprès<br />
Je vois bien que t’es le dernier de la portée, tu deviens rouge sous le chapeau que tu retires à peine tu te dis que t’as déjà sacré le reste de ton souper sur le pupitre ça doit être assez comme ça pour nous autres<br />
Et devant ton spectacle<br />
Je le vois que les mèches ne veulent pas tourner comme il faut<br />
Autour de tes doigts de fille en trip identitaire<br />
Tu peines ça me peine mais en même temps<br />
Je veux tout voir ce que tu t’appliques à masquer<br />
Ce soir tu ne sens pas<br />
L’air frais de la campagne à travers les trous de ton chandail de laine<br />
Tu ne vois tellement pas<br />
Les accidents artistiques dans tes vêtements<br />
Tu ne le prends pas<br />
Que la grâce soit gratuite, l’économie du don intégrale<br />
Tu te réfugies dans le silo de ta seule virgule<br />
Dans les alinéas sculptés au grès de tes poèmes qui n’en peuvent plus d’être en jachère.</p>
<p><br />
Peut-être que tu as peur de ne pas suffisamment structurer la rhétorique de tes entrailles. Que ça déborde trop du sang avec lequel tu te penses très près. Qu’on voit clairement l’intérieur de ta cuisse et la bordure de ton oreillette, le tiret qui s’échappe des grandes lignes que tu traces avec force. Tu sépares tes états en deux, tu divises ton âme au milieu, rendu au bout du trait tes doigts sont rendus à trembler comme tes bras<br />
Tes bras<br />
Que ton art fait rapetisser<br />
Quand tu ne choisis que les couleurs qui te font sentir à l’aise (carmin, brun mèche et bleu indigo)<br />
Quand tu évites les pinceaux croches et boudes Pollock<br />
C’est que tu écris avec les doigts toi<br />
Tu te grées le corps de gouache toi<br />
Tu fais sauter les couvercles des pots massons déchire les feuilles de papier carbone, toi<br />
Tu connais<br />
Ta cerise noire cérébrale<br />
Mais ton cœur reste petit raisin sec dans le coma<br />
Tu connais mais souvent dans tes ébats tu prends peur tu voudrais pas<br />
Faire un dégât de toi-même.</p>
<p><br />
Alors ce soir tu fais un tas<br />
Avec l’ensemble des organes que tu choisis d’offrir<br />
Tu fais comme si ça te faisait rien<br />
Tes bras sont trop étroits pour se donner à voir, pour se sentir ce soir<br />
Alors tu pousses tu essaies de tout faire entrer sous le grand plastique bleu<br />
Bleu royal à marde<br />
Bleu tsar de Russie qui écraserait son cigare au chou sur la petite plaie précieuse de tes avant-bras<br />
Mais le bouchon de fourrure doublé de Sibéries<br />
C’est toi.</p>
<p><br />
Pour continuer à ériger la tuque de ta personnalité tu tiens fort les quatre coins de la lourde bâche<br />
Dans le vent de juillet en février tu arrimes ton édredon de sentiments aux piquettes des quatre coins du pupitre<br />
Et tout tangue, l’organisation ne supporte pas tes retraits à la marge tes alinéas malaisés<br />
Tu proposes tes tripes pour souper<br />
Mais tu es anorexique sur les bords<br />
Tu te semi-présentes<br />
Dans les poèmes tu poses plein de points au lieu de laisser se faire les trous<br />
Ton cœur tes doigts et ta rate tirent des traits droits<br />
C’est toi qui les y obliges, c’est parce que tes petits bras tremblent trop, tu les forces à faire du sens quand ils veulent sentir<br />
Tu fronces les sourcils baisses ta tuque refais ta couette et lèves les yeux, regardes un coup en-dessous de la bâche de ton plastique <em>contenantiel</em>, quelque chose en toi veut quand même entendre tes organes pleurer.</p>
<p><br />
J’ai peur<br />
Que tu ne te ressembles pas assez<br />
Je voudrais pour toi<br />
La générosité de te donner<br />
Nous offrir tes tripes en camping<br />
Soulever la tuque sale de tes yeux de faiseur de petites flammes de grandes distances<br />
Je voudrais laisser ma tête dodeliner<br />
Te dire de l’autre côté<br />
Je t’ai retrouvé<br />
Tu étais déguisé en cœur léger.</p>
</div>
Mon, 01 Oct 2018 20:10:48 +0000Anonyme88 at http://quartierf.org
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